DU 7 SEPTEMBRE AU 21 DÉCEMBRE

DU 7 SEPTEMBRE AU 21 DÉCEMBRE
Photo: Francine Lavallée, septembre 2008, au Monastère de Tiksé, Ladakh.

mardi 10 août 2010

1. Sur l'impermanence des choses




Bonjour, chers co-voyageurs,

Le départ s'effectuera dans moins d'une lune, mais des éléments changent déjà de visage. Les deux extrémités du voyage risquent de devoir être remodelées. Encore cette pure réalité de l'impermanence, intrinsèque aux choses et qui se manifeste de façon surprenante.

Ces derniers temps, j'apprenais que le visa indien ne permettait plus de sortir de l'Inde pour moins de deux mois. Cette nouvelle règle pourrait compromettre mon passage au Népal, prévu pour les trois avant-dernières semaines de mon séjour en sol indien. Je ne pourrais (en principe) revenir sur Delhi pour reprendre mon vol de retour, le 21 décembre, à moins qu'un agent d'immigration m'accorde une permission spéciale. C'est du moins ce qu'osent avancer les employés du bureau des visas pour l'ambassade de l'Inde.

J'entrevois la possibilité de rencontrer Manoj, mon bon ami népalais, en Himachal Pradesh plutôt que de lui rendre visite au Népal, solution possible à une « punition » qui m'attriste un brin. C'est malgré tout un moindre mal, j'en conviens! Je me rendrai peut-être quand même à Katmandou si l'on me donne la « permission spéciale », sinon j'essaierai d'y retourner lors d'un prochain séjour himalayen.

Mon karma semble se dérouler, j'ai bien dit me « dérouler », ou « aboutir » si vous préférez, et je sais qu'une déception n'arrive jamais les mains vides : elle tient dans sa main droite sa petite sœur la tourmente.

Je suis tourmenté, inquiet, bousculé... heu... pour dire vrai, bouleversé!

Hier matin, j'ouvrais un courriel de Drukchen Rinpoché, un grand lama tibétain, le chef de la lignée Drukpa Kagyu; il envoyait des nouvelles catastrophiques de sa région d'attache. Le Ladakh vient d'être fortement frappé par la terrible inondation qui battait aussi le sol Pakistanais dans la nuit du 5 au 6 d'août. Dire que ce Petit Tibet comme on l'appelle si justement, est connu pour ne recevoir qu'environ de 110 mm de précipitation par an. 
Que se passe-t-il?

Où en est notre planète?

CNN News rapporte que Leh, la capitale Ladakhie, a subi de graves destructions au passage de la tempête. L'hôpital, ainsi qu'une banque ont été en partie emportés et l'on a fermé l'aéroport qui en principe devrait me permettre d'atterrir au Ladakh... dans un mois. À proximité, par l'eau et la boue, le village de Choglamsar, où des centaines de Tibétains et de Ladakhis sont installés dans des maisons de fortune pour réfugiés, est encore plus affecté et j'ai cru comprendre que le village de Disket a été presque entièrement rayé de la carte. 


Les nouvelles nous proviennent au compte-gouttes. Je ne sais même pas si les miens ont été touchés, s'ils ont encore la possibilité de communiquer. Inquiet, j'ai écris à mon jeune ami Thinles Paljor, celui dont je supporte les études depuis 2004. Le trois d'août, il m'écrivait qu'il était de retour à Jammu avec son jeune frère et sa sœur cadette, pour vivre une nouvelle année scolaire tous ensemble, pour la première fois!
Il semblait tellement heureux.

C'était la veille de l'inondation.

J'attends avec impatience le retour de nouvelles. Jusqu'où les récoltes vont-elles avoir été touchées? Il y a des morts et des blessés, mais chez ceux que je connais, tous sont-ils sains et saufs? Vais-je pouvoir aller vers Leh et Hemis-Shukpachan? Mes amis du guest-house de Leh sont-ils toujours en état de me recevoir dans la petite chambre où ils affectionnent habituellement de me loger? La maison est-elle encore debout? Quelle sorte de Ladakh vais-je retrouver?

Toutes les questions imaginables volent dans ma tête, comme des vautours qui tournent autour de mon esprit pour lui ravir son repos.

Tout est en perpétuel changement ici-bas. Les choses d'ici sont toutes aussi impermanentes que les Êtres qui les possèdent. Ça, je le sais davantage avec mon mental. Je constate encore une fois que nous sommes tous ignorants de penser que les éléments s'effacent lentement comme de vieilles photos sépia deviennent de vulgaires papiers glacés, jaunis par le temps et le passage des doigts. Nous sommes tous un peu bêtes de continuer à croire que tout va avoir une fin et de tout déployer pour éviter d'imaginer que cette « fin » puisse se présenter de manière abrupte, cavalière.

Voilà encore un autre voyage qui approche. Une autre aventure « au pays du karma », comme m'avait un jour dit mon ami Gauvindia. Combien de surprises m'attendent sur la Transhimalayenne?

Je sais cependant, en humble petit innocent, que le chemin sur lequel je suis déjà engagé est bel et bien le mien et je le parcourrai en votre compagnie!

Une de nos co-voyageuses m'a envoyé le lien qui suit:  (Merci à Johane Seymour)
Vous y trouverez des nouvelles...  dévastantes:



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Thundup (Raymond)